Accord secret entre le Tchad et l'association Arche de Zoé
PARIS-N'DJAMENA | 00h00 Une source proche du gouvernement tchadien affirme que le président de l'Arche de Zoé a rencontré Idriss Déby en septembre. Une source proche du gouvernement tchadien affirme que le président Tchadien a rencontré le président de l'Arche de Zoé en septembre.
ALAIN JOURDAN | 02 Novembre 2007 | 00h00
La semaine dernière, le président tchadien, Idriss Déby, ne trouvait pas de mots assez forts pour dénoncer les agissements de l'Arche de Zoé, qu'il semblait découvrir en même temps que la presse. Hier, une source proche du gouvernement tchadien nous a pourtant affirmé qu'Idriss Déby n'ignorait rien des détails de l'opération mise sur pied depuis plusieurs semaines par l'ONG française.
Cette même source précise que le président tchadien et le président de l'Arche de Zoé, Eric Breteau, se sont rencontrés courant septembre. Et de préciser: «Le rendez-vous a eu lieu en catimini en début de soirée dans la résidence privée d'Idriss Déby à N'Djamena, en dehors de l'agenda officiel.»
«Si cela est vrai, ça confirme ce que nous disons depuis le début de l'affaire. A savoir que l'opération était connue des autorités tchadiennes et françaises et que l'interdiction soudaine qui s'est abattue sur la réalisation de cette opération est une énigme», réagit Me Gilbert Collard, l'avocat de l'Arche de Zoé.
Eric Breteau qui était effectivement au Tchad en septembre aurait passé un accord avec le président. A l'appui de cette thèse, notre interlocuteur avance que c'est le palais présidentiel qui a délivré l'autorisation d'atterrir au Boeing 747 affrété par l'Arche de Zoé. Abéché étant considérée comme une zone de guerre, il ne pouvait pas en être autrement. «L'avion n'aurait pas pu décoller puis atterrir sans un plan de vol directement
approuvé par le président.»
Pourquoi l'opération a-t-elle capoté? Dans les rangs des rebelles comme dans l'entourage du président Déby, certains évoquent un désaccord de dernière minute. Du côté de l'Arche de Zoé, on peine à préciser les contours de ce mystérieux couac. Comme si le sujet était tabou. Ou plutôt, comme si les révéler pouvait nuire aux membres de l'association aujourd'hui détenus au Tchad.
Plusieurs personnes évoquent le rôle joué depuis Paris par Abacar Manany, conseiller spécial d'Idriss Déby. Décoré de la Légion d'honneur par
Jacques Chirac en 2005, ce diplomate aurait tout mis en oeuvre pour que Paris et N'Djamena stoppent l'opération et la réprouvent, de part et d'autre, avec la même vigueur.
Il reste que le rendez-vous jusque-là tenu secret entre Idriss Déby et le président de l'Arche de Zoé soulève de nouvelles questions. Idriss Déby
dit que son gouvernement a été trompé et que l'association a menti sur ses intentions. Qu'avait-il été convenu en septembre?
Un secret pour personne
L'Arche de Zoé n'a jamais caché que son intention était de rapatrier un maximum d'enfants. Ce n'était un secret pour personne, ni en France ni au Tchad. Aujourd'hui, dix-neuf personnes (neuf Français, sept Espagnols, deux Tchadiens et un Belge) sont poursuivies pour «enlèvement de mineurs». Aucune n'a pu encore s'exprimer librement sur le fond de l'affaire.
Du côté de la mission diplomatique du Tchad à Genève, on refusait hier «d'infirmer» ou de «confirmer» qu'il y avait bien eu une rencontre en septembre entre Idriss Déby et Eric Breteau. «Il y a parfois des opposants qui essayent de récupérer cette affaire pour dire n'importe quoi», se bornait-on à commenter. Si c'est le cas, les opposants se trouvent aussi dans les rangs de l'actuel gouvernement.